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Interroge a répondu à la question "Est-ce qu’il faut savoir dessiner pour être un artiste ?"
La réponse a été mise à jour le 13 février 2023.
Bonjour,
Nous vous remercions d'avoir fait appel au service Interroge, voici le résultat de nos recherches :
Certes, les points de vue divergent. Pour certains, être un artiste implique de savoir avant tout dessiner, mais pour d’autres, l’art va bien au-delà. De nos jours, savoir dessiner ne définit pas l’artiste. Le dessin est un apprentissage qui apporte des techniques et des bases, mais peut-on dire d’une personne qu’elle n’est pas une artiste parce qu’elle ne sait pas dessiner ? Et peut-on affirmer que quiconque sait dessiner est un artiste ?
Amylee, artiste et blogueuse, nous dit justement qu’en « 2020, un artiste ne se résume pas à la pratique du dessin académique ni à l’excellence d’un coup de crayon, un artiste est une personne qui se voue à l’expression d’une émotion ou d’un message transmis au travers d’une pièce unique, originale, d’une œuvre d’art. » Elle ajoute notamment que « le dessin est une technique qui s’apprend par observation et représentation grâce à des moyens graphiques. Le dessin, s’apprend… à tout âge. » Elle définit ainsi ce qu’est un artiste « Être artiste aujourd’hui, c’est savoir dégager une émotion ou une idée dans une expression plastique tout en laissant une trace, une empreinte. Être artiste c’est également faire des choix, créer, oser, dépasser ses peurs, passer à l’action. Être artiste, c’est surtout, avoir une pensée divergente : "Voir autrement". »
La réalité de l’artiste contemporain n’est cependant pas celle de ses prédécesseurs, même si le débat de la prépondérance de la ligne sur la couleur existe depuis la Renaissance, comme en témoigne l'article de Jacques Le Rider - Ligne et couleur : histoire d’un différend - en 1998 dans la Revue germanique internationale. A cette époque, toute pratique artistique a comme préalable indispensable la maîtrise du dessin, considéré comme le « père des trois arts… », ainsi que le rappelle Sébastien Champion dans son article Le dessin à la Renaissance : techniques et enjeux, publié le 21 mars 2021 sur le site Paragone. Il cite notamment Michel-Ange : « C’est le dessin ou trait, car on lui donne ces deux noms, qui constitue, qui est la source et le corps de la peinture, de la sculpture, de l’architecture et de tout autre art plastique, et la racine de toutes les sciences. […] Celui qui maîtrise la ligne atteindra la perfection en chacun de ses arts. » Sébastien Champion ajoute qu’« en italien le terme disegno signifie à la fois dessin et projet… c’est par le dessin que l’artiste visualise une idée. En français le terme est à mettre en relation avec le dessein, la finalité. »
Dès la fin du Moyen Âge, des artistes tels que Cennino Cennini, Léonard de Vinci ou Leon Battista Alberti rédigent des traités techniques destinés aux peintres, dont la formation a encore lieu majoritairement dans les ateliers. La copie est alors le moyen par excellence de former l’œil et la main du futur peintre, les maîtres constituant des « répertoires de modèles » (figures, parties du corps humain, drapés…) que les apprentis copient afin d’en maîtriser une représentation encore passablement stéréotypée. L’enseignement évolue avec les premières académies apparues au XVIe siècle à Rome et à Florence, où aux traités didactiques réunissant les règles et les principes du dessin s’ajoute l’étude du modèle, d’abord sculptural, puis vivant. A propos de l’importance du dessin dans la formation académique vous pouvez visionner le documentaire du Musée du Louvre - L’importance du dessin dans la formation académique - deuxième volet de sa série Initiation à l'histoire des arts 2013.
Malgré les nombreuses « révolutions » que connaît l’art occidental depuis le XVe siècle, le dessin reste l’un des éléments essentiels de l’enseignement académique jusque dans la seconde moitié du XXe siècle. Depuis Marcel Duchamp, l’idée prend peu à peu le pas sur la forme dans le champ de la création artistique, mais c’est surtout suite à l’avènement de l’art conceptuel dans les années 1960-1970 que le dessin perd sa prépondérance au sein de l’enseignement académique. Il n’est à l’heure actuelle plus qu’une pratique comme une autre au service du projet poursuivit par les étudiants en école d’art, même s’il conserve la vertu primordiale d’apprendre à regarder un motif et à en saisir les subtilités (proportions, ombres…).
Pour répondre à la question initiale, on constate que certains des artistes les plus novateurs de leur époque se sont vu reprocher une maîtrise approximative du dessin, et donc une « déficience » par rapport aux principes académiques dominants. Parmi eux Van Gogh, mais aussi Cézanne, comme nous l'apprend Raymond Court dans son article Cézanne et la vérité de la peinture , paru en 2006 dans la revue Etudes :
« On sait combien l’œuvre de Cézanne fut longue à être acceptée, sinon comprise. Celle-ci est assurément difficile à cerner, dans la mesure où s’y opère l’articulation entre le classicisme le plus exigeant et la modernité la plus révolutionnaire. De manière plus fondamentale surtout, on peut se demander si la résistance certaine qu’offre cette peinture ne répond pas à la profondeur même de son exigence d’une approche en acte du mystère le plus intime de l’expression esthétique, en correspondance avec l’idéal que le Maître d’Aix déclarait avoir poursuivi avec acharnement durant toute sa vie et qu’il nommait "la vérité de la peinture". »
Un autre témoignage par rapport à Cézanne - Les dessins de Cézanne : du conformisme à la liberté créatrice par François Chedeville : « [...] un ami qui reprochait à Cézanne de ne pas savoir dessiner. Ce reproche assez commun est tout de même paradoxal compte tenu de l’abondance de sa production connue (plus de 1500 dessins) [...] »
L’ouvrage Pour devenir un artiste : maximes, conseils, et exemples d'après les maîtres français contemporains de Marius Vachon publié en 1903, donne de nombreux conseils aux aspirants à la carrière artistique, et permet ainsi de se figurer les artistes de l’époque :
« [L’artiste] Roty, interviewé par Thiebaut-Sisson sur sa méthode de travail, répondait à l’écrivain : "Je fais comme les camarades quand un sujet m’est donné. Je réfléchis, je me désespère, et je décide que je ne réussirai jamais à faire sortir de ma pauvre tête quelque chose d’à peu près présentable. Pourtant, après avoir bien pensé, bien espéré, et bien désespéré, un beau jour, ça prend forme. Je jette un croquis sur le papier, suivi de beaucoup d’autres, et enfin je prends le modèle vivant pour affirmer les mouvements que j’ai entrevus. Je fais des dessins, ce que les grands maîtres appellent des cartons [...]" »
L’artiste contemporain Gérard Garouste dit « Techniquement, je suis classique, comme les meilleurs anciens. Je fais mes ébauches de toile comme Manet. Je tiens au classicisme du procédé. L’invention est à ce prix. Elle tient dans la limite du cadre, c’est-à-dire une technique. ». Ce passage se trouve dans Créer pour vivre vivre pour créer paru sous la responsabilité de Thierry Delcourt.
L’historienne de l’art Julie Enckell Julliard écrit dans son introduction pour le catalogue d’exposition Voici un dessin suisse de 2010 : « le dessin connaît dans le monde entier un succès sans précédent. Les publications sur ce sujet se multiplient, tandis que rien n’arrête plus la hausse des prix sur le marché de l’art. En France, l’intérêt pour le dessin contemporain croît régulièrement depuis quelques années. C’est ce dont témoignent la création en 2007 du Salon du dessin contemporain à Paris, l’organisation d’expositions focalisées sur le sujet ou les marques de reconnaissance multipliées à son égard […]. »
L’ouvrage L'archipel du dessin : Silvia Bächli, Marc Bauer, Alain Huck, Karim Noureldin, Markus Raetz, Didier Rittener de Françoise Jaunin parle également de la place et de l’espace du dessin dans l’art contemporain (quitter le format habituel) : « […] Mais l’enjeu du dessin contemporain tient au fait de rendre poreux, ambigu et fertile le passage entre son espace intérieur et l’espace alentour qu’il investit, prend à parti et métamorphose.
S’approprier d’autres outils et matériaux a fait gagner au dessin une liberté et une indépendance impensables dans son cadre et sa pratique traditionnels. En dépassant les limites de la feuille, du livre ou du portfolio, il n’abandonne pas forcément le papier qui demeure, voire redevient un complice aussi essentiel qu’inépuisable, mais il entre en relation active et interactive avec ce qui l’entoure. Et par-là s’adjuge des territoires qui, plus tôt, lui semblaient contraires, voire interdits : le "vide", la troisième dimension, le mur tout entier, le format géant – à l’échelle du corps, de l’architecture ou même de la nature – l’environnement, l’espace public…
Affranchi, tout en demeurant ancré à ses fondamentaux, de son image d’étape préparatoire, de son statut d’art réservé aux connaisseurs et de sa position en léger retrait par rapport à la scène artistique et au marché de l’art, le dessin est devenu un art majeur de notre temps. »
En conclusion, on peut dire que, malgré l’essor d’autres techniques et pratiques artistiques au XXe siècle, le dessin conserve une aura positive chez les artistes contemporains comme auprès du marché de l’art. La maîtrise du dessin demeure une qualité pour un artiste, mais ne constitue plus une contrainte absolue.
Pour aller plus loin sur le sujet:
Devenir artiste, une enquête biographique de Juan Carlos et Pita Castro
Courbet/Cézanne : la vérité en peinture de Denis Coutagne
Wege zum Künstler - Devenir artiste
Nous espérons que ces éléments vous aideront dans votre recherche. N'hésitez pas à nous recontacter pour tout complément d'information ou toute autre question.
Cordialement,
La Bibliothèque d'art et d'archéologie
Pour www.interroge.ch