La réponse a été mise à jour le 15 mai 2023.
Bonjour,
Nous vous remercions d'avoir fait appel au service Interroge, voici le résultat de nos recherches :
Le Centre national de ressources textuelles et lexicales (CTNRL) définit ainsi le proxénétisme (sens du droit) :
« Délit qui consiste à tirer profit, à tirer des revenus de la prostitution d'autrui ou à la favoriser. »
Plus loin ce même dictionnaire définit le « Proxénétisme hôtelier » ainsi :
« Délit qui pour un tenancier ou un gérant d'hôtel, de maison meublée, de pension ou de débit de boisson consiste à accepter ou à tolérer la prostitution d'autrui pour en tirer profit. »
De manière générale, le proxénétisme prend diverses formes comme nous l'explique Lilian Mathieu dans son article Le proxénète, cible mouvante des politiques de prostitution paru dans la revue Varia en 2018 :
« [...] le proxénète connaît une multiplicité d’incarnations, dont certaines peuvent être surprenantes : […] le proxénète apparaît parfois là où ne l’attend pas et sous des traits inattendus. Ce terme même d’incarnation apparaît restrictif : certes, les proxénètes sont avant tout des êtres de chair et de sang, capables et coupables d’actions répréhensibles. »
Par conséquent, des lieux spécifiques au proxénétisme dans l'histoire helvétique sont difficilement identifiables.
Cependant, historiquement, la prostitution est attestée depuis l'Antiquité, comme l'explique Philipp Sarasin dans l'article « Prostitution » du Dictionnaire historique de la Suisse (DHS) :
« L'affirmation selon laquelle la prostitution serait le plus vieux métier du monde semble aussi discutable qu'invérifiable. Mais sa présence dans la civilisation occidentale est évidente depuis l'Antiquité. »
Cet article évoque les conditions dans lesquelles la prostitution s'est jadis exercée en Suisse :
« Sur le territoire de l'ancienne Confédération, des femmes prêtes à satisfaire les désirs masculins en dehors du mariage sont attestées en divers lieux (maisons de prostitution, auberges, bains publics) et lors de manifestations comme le concile de Bâle (1431-1449) ou les foires de Zurzach. Dans beaucoup de villes, les autorités réglementaient cette pratique en la cantonnant dans des maisons réservées. »
L'article nous donne également à connaître les différentes formes du travail du sexe dans les siècles passés et l'aspect clandestin en Suisse :
« Tandis que les sociétés aristocratiques du XVIIIe s. voyaient se développer le phénomène des courtisanes et l'institution des maîtresses, tandis qu'un véritable marché du sexe tarifé se développait dans les villes européennes à l'époque de la Révolution française, la prostitution en Suisse demeura secrète et confinée dans des maisons privées et des auberges. »
Durant le 19ème siècle, ce même article nous brosse un portrait d'une prostitution souvent exercée dans un contexte urbain par des femmes venues chercher fortune en ville. Le proxénétisme y est évoqué :
« Beaucoup s'adonnaient, régulièrement ou occasionnellement, à la prostitution (paillardise), par détresse ou dans l'espoir d'un revenu meilleur et d'une vie moins difficile, mais souvent aussi parce qu'elles y étaient contraintes par des propriétaires de maisons de prostitution, des aubergistes ou des marchands pratiquant la traite d'êtres humains. […] Les autorités cantonales et municipales réagirent par une politique oscillant entre tolérance et répression. […] Le proxénétisme était souvent admis, tant que la moralité publique n'était pas offensée. »
Puis au début du 20ème siècle, en l'absence « des maisons », la prostitution se pratique sous une autre forme :
« De 1914 environ aux années 1960, la prostitution fut presque absente du débat public et prit la forme d'un racolage pratiqué dans certains bars et cabarets ou sur le trottoir de quelques rues chaudes (les maisons tombant sous le coup de l'interdiction du proxénétisme). »
La suite de l'article nous explique l'impact du sida sur ce métier :
« L'évolution en ce domaine se refléta dans la révision du droit pénal sexuel, en 1992, qui décriminalisa certaines formes de proxénétisme (à l'exclusion des cas prévus à l'art. 195 du Code pénal)… »
Concernant le proxénétisme précisément, un article de 2009 - disponible sur le site de l'Université de Genève - intitulé Marché du sexe en Suisse : état des connaissances, best practices, et recommandations de Géraldine Bugnon, Milena Chimienti, et Laure Chiquet tiré de la revue Sociograph explique la répression datant de 1942 :
« Bien que l'exercice de la prostitution ne fasse pas l'objet d'un texte de loi fédéral, on trouve dans le Code pénal suisse, dès 1942, une volonté de protéger la moralité de mœurs, en réprimant notamment le proxénétisme, le racolage actif et la prostitution homosexuelle, cette dernière étant considérée comme une débauche contre nature. Suite à la révision du Code pénal en 1992, ces mesures répressives, au caractère moralisateur, ont été supprimées du cadre légal fédéral. Les cantons, voire les communes, ont toutefois la compétence pour édicter des réglementations particulières sur la prostitution, et l'interdiction de racolage subsiste ainsi dans certaines législations cantonales. »
Pour développer ce sujet, sachez qu'à Genève existe le Centre Grisélidis Réal, centre de documentation internationale et bibliothèque sur la prostitution.
Dans le catalogue swisscovery vous trouverez des documents sur le sujet :
- Racoleuses et proxénètes : prostitution clandestine à Genève à la fin du XIXe siècle de Sébastien Bourquin
- La prostitution à Lausanne au XIXe siècle de Danielle Javet
- Putain de militance, l'association Aspasie, un espace de mobilisation prostituée, 1982-1990 de Coline de Senarclens
- Belle de nuit : Grisélidis Réal : autoportraits, un film de Marie-Eve de Grave
Et si vous lisez l'allemand :
- Piff, Paff, Puff : Prostitution in der Schweiz d'Aline Wüst
- Wertes Fräulein, was kosten Sie? : Prostitution in Zürich 1875-1925 édité par Philipp Sarasin, Regula Bochsler et Patrick Kury
Nous espérons que ces éléments vous aideront dans votre recherche. N'hésitez pas à nous recontacter pour tout complément d'information ou toute autre question.
Cordialement,
La Bibliothèque du Musée d'ethnographie de Genève
Pour www.interroge.ch